L'histoire de la Daurade est d'abord celle d'un tragique gâchis pour le patrimoine toulousain.
En effet jusqu'en 1761 se trouvait à cet emplacement une église paléochrétienne du Vème siècle aux mosaïques dorées, dont on ne sait exactement si elle fut bâtie sous l'Empire romain finissant ou (plus probablement) sous le règne des rois wisigoths qui firent pendant un siècle de Toulouse la capitale de leur empire éphémère. Sa notoriété venait également du fait qu'elle fut la première église dédiée à la Vierge en France.
Au XVIIIème siècle cette église antique, déjà affaiblie par des travaux visant à l'intégrer à une église romane au XIème siècle, menaçait ruine faute d'entretien. Or plutôt que de tenter de sauver ce monument unique en France, dont on ne trouvait l'équivalent qu'à Ravenne ou à Rome, on décida de construire sur son emplacement une nouvelle église qui serait l'égale de Saint-Pierre de Rome. Une ambition évidemment complètement irréaliste, qui tourna court rapidement et nous laissa avec cette église à la lourde façade classique, à laquelle manquent de surcroît les deux tours prévues qui auraient pu donner à sa silhouette un peu d'élégance.
Son cloître moyenâgeux, un des plus beaux de la région, ne connut pas un meilleur sort : il fut démantelé à la même époque. De l'antique monument il ne reste finalement que le nom, la Daurade, Deaurata en latin, qui signifie "la dorée".
Le prieur de l'abbaye de la Daurade était un des personnages les plus importants de la ville au moyen-âge, notamment parce qu'il avait des droits sur les moulins de la Garonne ainsi que sur le principal pont traversant le fleuve (lequel n'a pas survécu jusqu'à notre époque, emporté par les inondations).
Voir également les très belles explications (comme toujours) du Studio différemment : La Daurade, trésor perdu de l'âge wisigoth.
© Bing maps
La Vierge noire de la Daurade est particulièrement vénérée des femmes enceintes, elle reçoit toujours des centaines de lettres chaque année de tous les pays du monde. Sa garde-robe est alimentée par les plus grands couturiers français. L'autel sur lequel elle trône est une oeuvre en terre cuite émaillée de Gaston Virebent :
Les 7 grands tableaux du choeur sont l'oeuvre de Joseph Roques (vers 1810) qui fut un des maîtres d'Ingres. Il s'agit d'un cycle de Marie.
Voici une maquette reconstituant partiellement l'ancienne église aux mosaïques à fond d'or, visible au Musée Saint-Raymond :
Un petit fragment de ces mosaïques à fond doré a atterri on ne sait trop comment dans les réserves du musée Calvet d'Avignon, qui le prête au Musée Saint-Raymond :
Il reste un peu plus des colonnes, toutefois dispersées aux quatre vents : on en trouve à la villa dite "abbaye de Roseland" à Nice, au Louvre Lens, au MET de New-York, une encore au fond de la Garonne près de Muret... et deux se trouvent également à Toulouse au 4 rue Joutx Aigues dans le secret d'une cour. Voici ces dernières en photo (les chapiteaux ne sont pas d'origine mais sans doute médiévaux) :
Le musée Saint Raymond conserve également un exemplaire de chacun des trois types de colonnes utilisés :
Chapiteau corinthien et colonne à cannelures torses peu profondes :
Chapiteau ionique et colonne ornée de pampres :
Chapiteau composite et colonne à cannelures torses profondes :