L'hôtel de Bernuy

L'hôtel de Bernuy est le premier grand hôtel du pastel à Toulouse, reconnu comme l'un des plus beaux hôtels particuliers de la première Renaissance française.

L'hôtel fut bâti en deux phases que l'on distingue aisément autour des deux cours intérieures. Les bâtiments de la seconde cour de style encore gothique furent bâtis à partir de l'an 1503, et la belle tour d'escalier date de 1504. L'élégance de cette tour et l'ambition affichée de son propriétaire en font un éclatant symbole des tours capitulaires toulousaines. Plus haute qu'il n'était strictement nécessaire pour y loger l'escalier, elle témoigne d'une véritable compétition sociale qui en fait une "tour d'orgueil". En effet, Bernuy demanda au maçon Merigo Cayla de la faire "aussi haute que celle de Monsieur le procureur du roi" (laquelle n'existe plus). Elle passe parfois à tort pour être la plus haute tour capitulaire de la ville, mais il n'en est cependant rien car si avec ses 26 mètres de hauteur elle constitua pendant quelques décennies un sommet parmi ses semblables, elle fut ensuite dépassée par plusieurs autres tours du XVIème siècle, telles celles des hôtels de Mansencal et d'Assézat. Nous avons également là l'occasion de tordre le cou à une autre idée reçue : l'érection de ces tours dites "capitulaires" n'était pas réservée aux seuls capitouls, et Bernuy fit bâtir la sienne près de 30 ans avant de devenir capitoul.

La première cour Renaissance en pierre constitue la cour d'honneur, elle a été construite de 1530 à 1536, son architecte fut Louis Privat. Ce dernier ne suivit cependant pas parfaitement les canons architecturaux de la Renaissance, ouvert notamment aux influences espagnoles plateresques il réussit - selon les mots de l'historien Paul Mesplé - à faire vivre l'Espagne, l'Italie et la Loire sous le ciel de Toulouse. En effet l'influence du val de Loire se remarque particulièrement dans les chapiteaux composites, alors que les colonnes-candélabres par exemple sont inspirées des Medidas del romano, traité espagnol de Diego de Sagredo dont on relève également l'influence dans d'autres hôtels particuliers toulousains.

La qualité du décor et des structures architecturales de cette cour lui a valu d'être moulée et copiée au palais de Chaillot à la Cité de l'Architecture et du Patrimoine pour illustrer le style de la première Renaissance en France ; c'est dire par conséquent son intérêt au plan national, même si les murs noircis de pollution gagneraient beaucoup à être nettoyés.

Jean de Bernuy était un marchand originaire de Burgos, en Espagne. Il vint s'installer à Toulouse pour se lancer dans le négoce du pastel et devint très vite l'homme le plus riche de la ville (on dit qu'il contribuait à lui seul pour 20% des recettes fiscales de Toulouse) et l'un des plus fortunés de France. Il se porta caution auprès de Charles-Quint de la faramineuse rançon exigée pour la libération du roi François Ier fait prisonnier à la bataille de Pavie en 1525. A titre de remerciement, Jean de Bernuy eut l'honneur de recevoir le roi et sa cour dans son hôtel. Il fut capitoul en 1533.

En 1556 lors d'une fête donnée en l'honneur de son neveu il fit combattre un taureau contre des dogues. Mais le taureau s'échappa et le trouva sur son chemin... c'est ainsi que mourut à plus de 80 ans Jean de Bernuy, considéré comme le premier aficionado toulousain.

En 1566 les Jésuites rachetèrent l'hôtel et y établirent leur collège, ils y formèrent jusqu'en 1762 - date de leur expulsion de France - une grande partie des parlementaires toulousains. De nos jours l'hôtel est intégré au lycée Pierre de Fermat, la plus sûre façon de le découvrir est de passer par les visites de l'office du tourisme.

Notons enfin que de la première cour Renaissance seule la moitié est parvenue jusqu'à nos jours, sur les quatre façades d'origine deux ont disparu, sans doute assez tôt dans l'histoire de l'hôtel.


Ce portrait de Jean de Bernuy illustre sa brillante ascension, comme le montrent la mention de ses nombreux titres seigneuriaux, les armoiries, la fourrure et les écus répandus :
L'hôtel de Bernuy

La seconde cour et sa tour, emblématique des tours capitulaires toulousaines, furent construites entre 1502 et 1504 par Guillaume et Jean Picart, père et fils, et Merigo Cayla :
L'hôtel de Bernuy

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La première cour de style Renaissance :
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La voûte surbaissée et son décor de "choux" dans des caissons, prouesse architecturale pour l'époque :
L'hôtel de Bernuy

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Une petite tête isolée au milieu des "choux", on pense qu'il s'agit du portrait de l'architecte, Louis Privat :
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Ici sans doute le portrait de Jean de Bernuy :
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Et celui de Madame de Bernuy ?
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Les fameuses colonnes-candélabres de l'hôtel de Bernuy sont inspirées des Medidas del romano, traité espagnol de Diego de Sagredo (1526). Elles ne sont pas les seuls éléments de l'hôtel dans ce cas (pour en savoir plus, suivez ce lien vers l'étude de Colin Debuiche) :
L'hôtel de Bernuy

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Pour comparaison gravure tirée du traité Medidas del romano :
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Le portail sur la rue... lui aussi aurait besoin d'un ravalement :
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Il date de la première campagne de construction gothique (1503-1504, putti, devise), mais a été complété lors de la deuxième campagne (médaillons) :
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Les médaillons Renaissance du portail :
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La devise des Bernuy est gravée en latin : SI DEUS PRO NOBIS, début d'une phrase de la Bible signifiant "Si Dieu est avec nous, qui sera contre nous ?".
L'hôtel de Bernuy

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Notez que le "N" de "NOBIS" a été gravé à l'envers ! Je doute qu'il s'agisse d'un accident, mais j'en ignore la raison :
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Vous voudriez voir ce que donnerait cette cour sans la couche de pollution qui la ternit ? Au palais de Chaillot le moulage du portique déploie sa beauté immaculée :
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