Les bords de Garonne

Il ne fait guère de doute que la Garonne offre à Toulouse ses plus belles perspectives. La rive gauche avec ses deux hôpitaux d'origine médiévale et la rive droite avec ses quais et ses façades de brique sont reliées par le pont neuf, un ouvrage monumental de brique et de pierre qu'il fallut plus d'un siècle pour construire, seul capable de résister aux terribles crues que le fleuve connut dans le passé.

L'histoire de Toulouse avec la Garonne est une histoire d'amour/répulsion. Voie de communication qui permettait d'acheminer sur des radeaux le bois et les marbres des Pyrénées, et d'expédier vers l'aval des marchandises telles que le pastel au XVIème siècle, elle fut aussi la cause d'inondations dévastatrices qui expliquent que son cours soit corseté par de hautes digues tout au long de son passage à travers la ville.

Ainsi la crue de 1875 fit-elle 209 morts, auxquels on peut ajouter 1400 maisons détruites, toutes sur la rive gauche. Venu se rendre compte en personne du désastre, le président de la République Mac-Mahon ne put trouver que ces mots restés célèbres (mais qui ne seraient semble-t-il pas authentiques) : "Que d'eau, que d'eau..."


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La rive gauche et le Pont-Neuf

Plus basse que la rive droite, la rive gauche fut le déversoir naturel du fleuve en crue. Plusieurs fois par siècle on déplora des inondations provoquant de nombreux morts. Elle devint par conséquent la rive des déshérités et des indésirables. Dès le moyen-âge on y construisit deux grands hôpitaux, le premier d'entre eux est l'hôtel-Dieu-Saint-Jacques (la construction des bâtiments s'est étalée du XIIème au XIXème siècle), qui avait notamment pour vocation d'accueillir et de soigner les pèlerins sur la route de Compostelle. Cet ancien hôpital est classé à l'UNESCO, ainsi que la basilique Saint-Sernin, au titre des Chemins de Saint-Jacques de Compostelle. Le second est l'hôpital de la Grave (depuis le XIIème siècle, mais les bâtiments actuels sont, pour les plus vieux, du XVIIème siècle), le spectaculaire dôme de cuivre de sa chapelle date pour sa part du XVIIIème siècle. C'était surtout l'hôpital des lépreux et des pestiférés, qui dans ces grands bâtiments pouvaient être isolés des autres patients et bien entendu du reste de la ville.

Deux autres lieux intéressants bordent cette rive gauche : l'ancien château d'eau, qui fut en 1974 la première galerie de photos de France, et les anciens abattoirs, transformés pour leur part en musée d'art moderne.


L'hôtel-Dieu-Saint-Jacques

L'hôtel-Dieu-Saint-Jacques vu du fleuve :
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Il reste sur la Garonne une pile de l'ancien pont couvert de la Daurade, qui fut le principal pont (plusieurs fois détruit par les crues et reconstruit) sur la Garonne jusqu'à la construction du Pont neuf :
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Sur le fleuve, la façade de l'Hôtel-Dieu est marquée par les trous de boulin. Ils servaient autrefois à fixer les échafaudages pour la construction et l'entretien du bâtiment :
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Près de l'entrée demeure un "tour à bébés". Les bébés abandonnés étaient déposés dans la niche, la mère (ou quiconque apportait le bébé) sonnait, puis les religieuses faisaient tourner le tour pour récupérer le bébé tout en préservant l'anonymat du déposant (faute de quoi, on aurait comme auparavant retrouvé des cadavres de bébés dans la campagne environnante) :
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La salle des pèlerins, ou salle des pas perdus, et ses belles boiseries dont la statue de saint Jacques :
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Dans cette salle figurent plusieurs portraits de donateurs de l'hôpital. Ce portrait représente la duchesse d'Angoulême, l'une des bienfaitrices de l'hôpital. Fille de Louis XVI et de Marie-Antoinette elle épousa le duc d'Angoulême. Lorsque Napoléon Bonaparte revint au pouvoir lors des cent jours, elle tenta intrépidement d'organiser la résistance à Bordeaux. Ce qui fit dire à Bonaparte : "ça ne m'étonne pas, elle est le seul homme de la famille !"
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La chapelle de l'hôpital :
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La salle des Colonnes servait de salle d'hospitalisation. Les colonnes ont été faites en 1858 avec des mâts de navires déclassés :
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Notons que l'aile ouest abrite un intéressant musée de la médecine :
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L'hôpital de la Grave

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Le château d'eau

L'ancien château d'eau (1825) avait pour fonction de récupérer l'eau de la Garonne, purifiée par la prairie des filtres, et de la redistribuer aux Toulousains :
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Les abattoirs

Les anciens abattoirs du XIXème siècle, oeuvre de l'architecte de la ville Urbain Vitry, ont laissé la place à un musée d'art contemporain et à un joli parc qui a remis en valeur une partie du rempart 16ème siècle de Toulouse :
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Le fameux rideau de scène de Picasso est l'une des pièces maîtresses du musée. Intitulée "La dépouille du minotaure en costume d'arlequin", la peinture représente un gigantesque rébus : le Fascisme, oiseau rapace, soutient le bestial capitalisme prêt à s'écrouler. Lui faisant face, un homme barbu se dégage des dépouilles d'une bête, et porte sur ses épaules un génie nimbé d'étoiles.
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Sieste sous les remparts :
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Le Pont-Neuf

Comme celui de Paris, le Pont-Neuf de Toulouse est en réalité le plus vieux pont de la ville (si on excepte un pont bien plus petit - le pont de Tounis - lancé sur ce cours d'eau maintenant insignifiant qu'est la Garonnette). Il faut dire que les ponts plus anciens furent emportés par les terribles crues que la Garonne savait avoir toutes les quelques décennies, et que fort de ces expériences celui-ci fut spécialement conçu pour résister aux crues, jugez-en plutôt : reprenant des techniques utilisées par les Romains telles que les crêtes pour séparer les flots devant les piles et les oculus au milieu des piles pour laisser passer l'eau même lorsqu'elle atteint le haut des arches, il reprend aussi une technique nouvelle à la Renaissance qui consiste à avoir des arches en forme d'anse de panier, ou surbaissées, c'est à dire plus larges que hautes et autorisant ainsi d'avoir à la fois moins de piles et un dénivellé modeste. Il est bien possible que le Pont-neuf de Toulouse ait été le premier pont à mettre en oeuvre toutes ces techniques ensemble, ce qui en faisait un pont bien plus moderne que le Pont-neuf de Paris qui lui était contemporain, par exemple. Des sept arches permettant de franchir les 220 mètres du fleuve, la plus grande a une portée de 37 mètres.

Tout au long de son histoire - ou presque - Toulouse fut la base arrière des opérations militaires contre l'Espagne, tant défensives qu'offensives, et à la Renaissance cela lui valait d'ailleurs la présence d'un important arsenal. C'est en 1541 sous l'impulsion de François Ier, qui avait quelques raisons de se méfier de l'Espagne conquérante de Charles Quint, que la construction du Pont-Neuf fut décidée dans le but stratégique d'assurer le passage des troupes d'un côté à l'autre de la Garonne par n'importe quel temps.

Le roi autorisa à cet effet la levée d'un impôt spécial sur la région, mais l'argent vint souvent à manquer et sa construction commencée avant 1545 ne permit une mise en service qu'en 1632 et une inauguration par Louis XIV qu'en 1659.

Les grand maîtres actifs à Toulouse au début du chantier, le sculpteur Jean Rancy, le peintre Bernard Nalot, les architectes Louis Privat, Nicolas Bachelier, puis dominique Bertin et Dominique Bachelier côtoyèrent des experts en ingéniérie hydraulique appelés pour la mise au point de nouveaux procédés de fondation en milieu aquatique. Plus tard, Pierre Souffron y rencontra les jeunes Jacques Lemercier et François Mansart.

Ce chantier fut donc un lieu d'émulation, d'échange et de formation, au rayonnement national et même européen : à la demande du roi Philippe II d'Espagne, Dominique Bachelier se rendit à Saragosse en 1584 pour la réparation du pont réunissant les rives de l'Ebre.

Sa solidité fut mise à l'épreuve lors de la crue de 1875, sans doute la plus terrible de toutes, et alors que tous les autres ponts de Toulouse (pourtant plus modernes) cédaient les uns après les autres sous les assauts des flots furieux, lui seul tint bon. Cette crue faillit pourtant réussir à avoir sa peau, si l'on peut dire, puisqu'il fut ensuite accusé d'avoir fait barrage aux flots et d'avoir ainsi aggravé l'inondation de la rive gauche. Au début du XXème siècle il fut donc question de le raser (projet de l'ingénieur en chef Pendariès), ainsi que l'hôtel-Dieu-Saint-Jacques, avant que les défenseurs du patrimoine toulousain ne réussissent à écarter la menace pesant sur ce bijou architectural.

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Représentation de la crue de 1875. En quelques heures le fleuve multiplia par 40 son débit moyen, passant à 8000 mètres cubes par seconde. Bilan : 200 morts et 1000 maisons détruites, toutes sur la rive gauche plus basse :
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Malgré une majesté que l'on devine, le Pont-neuf n'a pas actuellement l'aspect de noblesse que ses concepteurs avaient prévu et que son importance commandait. L'arc de triomphe dédié à Louis XIII qui décorait son entrée ouest a été rasé au XIXème siècle pour faire de la place à la circulation, et les décorations sculptées de masques de lions qui devaient décorer les bossages de ses "dégueuloirs" côté aval ne furent jamais réalisées :
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La prairie des filtres et le cours Dillon

Un très beau parc borde la Garonne au pied du Pont-Neuf : il s'agit de la prairie des filtres, ainsi nommée car ses alluvions servaient à filtrer l'eau pour le château d'eau. Au début du XXème siècle quelques finales du championnat de France de rugby se disputèrent sur cette prairie (6000 spectateurs en 1903 !). Elle servit aussi de première piste de décollage pour l'aviation à Toulouse, il y avait évidemment moins d'arbres !
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Le cours Dillon est l'oeuvre d'Arthur Richard de Dillon, archevêque de Toulouse et président des États de Languedoc en 1763. Cette belle allée bordée d'arbres surplombant la digue de briques qui borde la prairie des filtres servait (et sert toujours) de promenade :
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La rive droite est pour sa part très différente de la rive gauche, je vous invite à la découvrir dans la page suivante : Page rive droite